Et maintenant ?

Depuis le 6 mai dernier,  nous avons donc un nouveau Président, un Président « normal » même !

Cela reste un concept assez curieux, mais en tout cas, les Français ont fait le choix d’une alternance « normale » : à la droite succède la gauche. Peut-être trop de normalité dans une période marquée par des difficultés qui, elles, sont hors normes …

Bref, Nicolas Sarkozy a laissé le pouvoir à un PS tout puissant qui contrôle dorénavant toute la politique en France : L’Elysée, le gouvernement, l’Assemblée Nationale, le Sénat, les régions, la majorité des Départements et des grandes villes du pays. Sale temps pour les adeptes du pluralisme politique et des contre-pouvoirs !

Inutile de revenir sur le choix des Français, il était clair dès le premier tour de la présidentielle : bipolarisation et conservatisme ; le tout baignant dans la peur de l’avenir avec, comme pensée unique, la politique de l’autruche. Le second tour de la présidentielle n’aura été qu’un vote « pour » ou « contre » la personne du Président sortant. Les législatives, un mois plus tard, n’ont-elles pas été une pure perte de temps ? Les Français n’y ont manifesté aucun intérêt et ceux qui sont allés voter, l’ont fait sans  imagination, de façon mécanique, bien éloignée des enjeux réels et majeurs de cette nouvelle mandature.

Le sarkozysme aura vécu et avec lui les ambitions de la droite soi-disant « populaire » aux valeurs si peu humanistes. Qui s’en plaindra ? Au regard des 5 années passées dans une opposition pragmatique et constructive au sein du Mouvement Démocrate, sûrement pas moi !

Néanmoins, le tout Etat PS ne fait pas rêver ; il ne fait déjà plus rêver grand monde. Les promesses de campagne sont bien lointaines et les premières mesures n’annoncent rien de bon : dépenses publiques, imposition des classes moyennes, alourdissement  des charges pour les entreprises…

Les perspectives des mois à venir semblent promettre toujours plus de chômage, avec son effet boumerang sur le pouvoir d’achat.

Comment aurait-il pu en être autrement ? Le candidat de la vérité, François Bayrou, avait livré un diagnostic sans concession dès l’été dernier dans son livre : 2012, état d’urgence. Il avait proposé aux Français un vrai changement de « braqué » (métaphore cycliste en cette période du Tour de France !) pour affronter cette situation d’urgence. Il n’a pas été entendu. Son absence au second tour de la présidentielle était l’assurance, quel que soit le vainqueur, d’un réveil collectif brutal et douloureux.

Nous allons connaitre des mois très pénibles. Notre pays va être confronté à des périls majeurs. La politique gouvernementale ne sera sans doute pas en mesure d’y répondre, confisquée par un seul camp, par un seul parti.

Le PS gouvernera seul et sans partage. Comment s’en étonner ? C’est dans ses gènes : un parti hégémonique, tout comme son jumeau de droite, l’UMP. Fous, ceux qui ont pu croire que le PS tendrait la main à des forces plus au centre ! Dans un monde bipolaire, n’existent que les rapports de forces.

L’opposition n’offre, aujourd’hui, pas plus de garantie. Privée de la plupart des contre-pouvoirs, elle est en proie à des luttes d’influence idéologiques et stratégiques.

Avec l’influence grandissante du FN de Marine Le Pen, le danger de la radicalisation de la droite française est aujourd’hui réel. Abandonnant sa stratégie de l’isolement, le FN revendique le leadership de l’opposition face aux pleins pouvoirs du PS.

A ce titre, la lutte interne au sein de l’UMP entre Copé et Fillon, entre populistes et gaullistes sociaux, pourrait bien être déterminante pour l’avenir de notre démocratie. L’issue de cette lutte intestine peut ouvrir la voie à la radicalisation de l’opposition, ce qui serait extrêmement dangereux à long terme.

Alors, dans ce paysage des plus déprimants, quelle place reste-t-il pour le courant centriste, européen, pragmatique et modéré ?

L’idée d’une troisième voie, d’une force centrale indépendante, a vécu. Les Français l’ont rejetée. Gâchis ? Sans doute. Trop tôt ? Peut-être. Mais il y a des rendez-vous avec l’histoire qui ne se représentent plus…

Restent des valeurs, des idées et même encore quelques femmes et hommes de talent pour les porter. Sûrement pas dans la majorité présidentielle qui s’est constituée sans eux, qui ne s’est pas ouverte à eux et qui, surtout, applique, finalement, une politique peu compatible avec eux.

Dans un monde bipolaire, une place centriste et modérée est disponible au sein de la nouvelle l’opposition.  Mais avec quel leader et quels partenaires ?

En votant publiquement François Hollande au second tour de la présidentielle, François Bayrou a fait le choix de ne pas être ce possible leader dans une opposition en reconstruction. C’est bien dommage ; il eût été un formidable contrepoids face à la tentation de radicalisation de la droite.

Cela n’aura donc pas lieu. Demeurent des scenarii multiples et une grande incertitude… La nature ayant horreur du vide, des espaces politiques vont se reconstituer dans cette nouvelle opposition. Mais sous quelles formes ? Et avec quelle idéologie et quelles figures dominantes ? A aujourd’hui, rien ne permet de répondre à ces questions et les gesticulations actuelles des hommes politiques ne sont pas significatives. Plus que jamais, il est urgent d’attendre

Par ailleurs, les Français ont eu leur overdose de politique. L’heure est à la prise de recul et à la remise en question.

Une page se tourne ; 5 ans de vie politique rythmée par Nicolas Sarkozy auront profondément malmené notre fonctionnement républicain, sans trouver pour autant les réponses adéquates aux soucis quotidiens de nos concitoyens. Cette année d’élections nationales montre à l’évidence les limites d’une gouvernance centralisée et très éloignée du quotidien.

Demain, pour celles et ceux qui continueront ce si beau et si nécessaire engagement citoyen, il faudra remettre l’ouvrage sur le métier pour recréer un lien véritable entre les citoyens et la politique.

La clé du redressement de notre pays est peut-être au plus près de nous, dans nos collectivités locales et nos communes…

Bonnes vacances à tous !

Adrien Debever

3 réflexions au sujet de « Et maintenant ? »

  1. Merci et bravo Adrien pour cette analyse et ces réflexions, je les partage presque toutes et comme toi je crois qu’il est urgent d’attendre, et comme toi je crois qu’il y a des talents autour de nous qui ne demandent qu’à s’exprimer au niveau local … pour commencer!
    à bientôt donc

  2. Excellente analyse?
    François Bayrou a déçu en annonçant publiquement son choix…..
    Votre lettre d’information est de grande qualité et très objective
    Continez à dispenser ces précieuses informations et ces précieux conseils !

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